Faut-il vraiment interrompre le THS après un infarctus ?
Il y a encore peu de temps, le traitement hormonal substitutif (THS) était paré de toutes les qualités.
L’une d’elles était son effet cardio-protecteur, vanté jusqu’à la fin des années 90. Depuis, à la lumière de certains travaux, les recommandations ont été modifiées et le THS ne doit plus être
prescrit dans l’indication de prévention cardio-vasculaire, primaire ni secondaire.
Le problème se complique avec les patients sous THS qui présentent un accident coronarien. Les guidelines préconisent l’arrêt du traitement. Mais est-ce bien le moment, à cette période de
post-infarctus, période sensible, de dysfonction endothéliale et d’élévation des marqueurs de l’inflammation ? Il est permis de se demander si l’interruption du THS à ce moment ne risque pas de
provoquer un rebond de ces mécanismes, avec un effet délétère cardiovasculaire.
Une équipe danoise s’est penchée sur la question et a réalisé une étude de cohorte basée sur les registres nationaux. Entre 1997 et 2008, 3 322 patientes ont présenté un infarctus du myocarde
alors qu’elles étaient sous THS. Le traitement le plus utilisé était la combinaison œstro-progestative, suivie des œstrogènes par voie vaginale et des œstrogènes seuls par voie systémique.
Il s’avère que les patientes qui suivent les recommandations et arrêtent leur THS dans l’année qui suit leur infarctus, n’ont pas un risque différent de celles qui poursuivent le traitement, en
ce qui concerne les rechutes d’infarctus (Hazard Rario : 0,90 ; intervalle de confiance à 95 % : 0,68 à 1,19) ou la mortalité, cardiovasculaire (1,21 ; 0,90 à 1,62) ou toutes causes (1,22 ;
0,97 à 1,53). Tout juste l’arrêt des œstrogènes par voie vaginale semble-t-il associé à une diminution du risque de rechute d’infarctus.
Cette étude présente toutefois quelques faiblesses qui ne résident pas seulement dans sa nature observationnelle. Manquent en effet des données d’importance tels que le statut des patientes vis
à vis de l’obésité ou du tabac, les autres risques cardiovasculaires, l’usage d’autres traitements associés, les comorbidités. Les auteurs conviennent eux-mêmes qu’ils ne peuvent écarter la
possibilité de facteurs confondants. Reste que les résultats ne donnent pas tort aux 80 % de danoises qui, après avoir fait un infarctus alors qu’elles étaient sous THS, ont décidé malgré tout
de poursuivre leur traitement.
Dr Roseline Péluchon
Bretler DM et coll. : Discontinuation of hormone replacement therapy after myocardial infarction and short term risk of adverse cardiovascular events: nationwide cohort study.
BMJ 2012;344:e1802 doi: 10.1136/bmj.e1802